Nouvelle campagne Les yeux rivés sur le maïs américain
Alors que les récoltes sont prometteuses de l’Europe à la mer Noire, ce sont les cultures américaines, en premier lieu le maïs, qui font l’objet de toutes les attentions en ce début de campagne. Mais la prudence reste de mise quant à un éventuel frémissement des cours. Par Renaud Fourreaux
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Les conditions climatiques américaines dans la Corn Belt sont au cœur des préoccupations depuis plusieurs semaines. En raison de précipitations extrêmes ces derniers mois, d’inondations à répétition, les maïs et les sojas ont eu tout le mal du monde à être semés ou à lever. Le rapport publié par l’USDA le 11 juin a entériné la situation délicate du maïs américain, confronté à des retards inédits dans l’avancée des semis. Les surfaces ont été revues à la baisse de 1,2 Mha et les rendements de 6,3 q/ha, ce qui conduit à une prévision de récolte nationale grevée en un mois de près de 35 Mt, à 347 Mt ! La moisson mondiale record qui était attendue n’est plus à l’ordre du jour, et les stocks mondiaux de fin de campagne 2020, à 290 Mt, seraient les plus bas depuis cinq ans.
Des cours animés aux USA
Ces chiffres ne demandent qu’à être révisés, « certains analystes jugeant la position de l’USDA conservatrice sur les surfaces semées », rappelle l’AGPM. Une donnée qui va être suivie de près pendant les prochaines semaines, de même que l’état des cultures. En outre, la fraîcheur persistante aux États-Unis fait craindre des récoltes tardives, au moment des premières gelées automnales.
La situation est assez similaire en soja, puisque le retard de semis est également conséquent. L’USDA estime que 77 % des surfaces étaient semées mi-juin, contre 93 % habituellement à cette période, mais l’ampleur des superficies non semées est encore incertaine. Les opérateurs ont d’ailleurs été interloqués de ne pas voir intervenir une révision des estimations sur la superficie et la production de soja prévues aux États-Unis dans le rapport du 11 juin, même si le ministère de l’Agriculture américain a d’ores et déjà annoncé qu’il actualiserait les chiffres en juillet.
Toute cette agitation n’a pas manqué de provoquer une vive remontée des cours outre-Atlantique, en premier lieu celui du maïs, qui a atteint à Chicago son plus haut niveau depuis 2014, les fonds non commerciaux accompagnant bien entendu cette hausse. Le blé Soft Red Winter, qui pourrait davantage être sollicité par l’alimentation animale pour pallier le manque de maïs, est sous tension également, d’autant que des inquiétudes émergent sur la qualité.
Cette fébrilité ne s’est néanmoins pas vraiment propagée ailleurs dans le monde où l’on se prépare à accueillir de bonnes récoltes, notamment une production record de blé, qui croît de 50 Mt, à 781 Mt en un an, selon le même USDA, faisant remonter toujours plus le niveau des stocks de report. Les récoltes s’annoncent prometteuses aussi bien en Europe, autour de la mer Noire, qu’en Amérique du Sud. L’Argentine devrait enregistrer une production record de maïs (49 Mt), et le Brésil la deuxième meilleure récolte de son histoire, à la faveur d’une safrinha abondante.
Des échanges limités
C’est donc bien sur les cultures américaines que se concentre l’attention, les seules susceptibles, à ce stade, d’animer les bourses. « Aujourd’hui, il y a le doute, et cela se traduit par de la nervosité dans les marchés », relate Gautier Le Molgat, chez Agritel. À la question de savoir si le maïs va être le driver de la campagne, François Luguenot, responsable de l’analyse des marchés chez InVivo, répond : « C’est le seul grain où il pourrait y avoir une histoire, en tout cas. En blé et en orge, je ne vois aucun facteur haussier, il y aura de quoi faire. En maïs, qui sait ? Mais il ne faut jamais oublier qu’il y a toujours la guerre commerciale sino-américaine et l’épidémie de peste porcine africaine en Chine. » Deux facteurs qui limitent le commerce des matières premières agricoles. « Ce sont des millions de tonnes de maïs et de soja qui ne vont pas sur le marché. Cela met un couvercle sur une hausse potentielle des cours. »
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